Le collège Jean Zay de Montreuil-Juigné remarqué pour sa participation au prix « La jeune nouvelle » de l’AMOPA de Maine-et-Loire.

Dans le cadre du concours national de l’AMOPA « Plaisir d’écrire », les collèges ont l’opportunité de participer au prix de « La jeune nouvelle » permettant de créer une dynamique de groupe au sein de la classe, de motiver les élèves et de travailler différemment autour d’un projet.

Madame Emmanuelle Fégar, professeure de français au collège Jean Zay de Montreuil-Juigné, avec ses élèves de la classe de troisième, se sont investis dans ce projet. Deux nouvelles ont été sélectionnées : les lauréats du « Prix départemental de la jeune nouvelle » sont Léa D. et Tyméo C.

Vëtna Leduen

Massalia soupira et tenta de cacher sa déception au moment où la reine Aria s’engouffra dans sa chambre. Longtemps parue douce et gentille avec Massalia et Adrien, la reine Aria n’était pas ce qu’elle semblait être.

Il y a quelques mois, la princesse Massalia avait surpris sa mère en train de comploter avec de dangereux criminels, emprisonnés pour leurs actes. Coopératifs, ils avaient accepté d’aider Aria à accéder au pouvoir en échange d’argent et de leur liberté.

Prévenu de ce complot, le roi Adrien avait fait exécuter ces traîtres mais avait préféré ne rien faire à la reine car, au fond, il ne la croyait pas capable d’une telle chose. Peu après cela, l’autre visage qu’Aria gardait autrefois en elle avait surgit car tout le royaume connaissait son ambition : le trône de Lidatsse. Elle s’était aussi cruelle qu’une épidémie qui massacrerait le royaume. La reine de Lidatsse possédait bien d’autres défauts encore mais cette liste aurait été d’une longueur épuisante pour ceux qui l’entendraient.

Aria s’avança vers le lit de sa fille, l’allure noble, l’air fier et le menton levé. Elle dévisageait Massalia avec une horrible haine, tellement profonde qu’il se révélait impossible d’y voir le fond.            

Aria la réprimanda de sa voix arrogante et accusatrice :

— Que fais-tu Massalia ? Tu devrais déjà être en train de t’exercer au poignard, étant donné que ton misérable père te l’a demandé.

— Il ne m’a pas obligé à le faire. Il me l’a conseillé, précisa Massalia, sur la défensive.

— Je t’ordonne d’y aller ! s’enflamma Aria.

Mécontente, elle s’avança vers la princesse de Lidatsse pour la frapper et la soumettre à son ordre mais Massalia appela les gardes, postés à l’extérieur de ses quartiers, afin qu’ils interviennent. Deux d’entre eux arrivèrent en courant, leurs armes en main, prêts à protéger la princesse de potentiels ennemis qui se seraient introduit dans la chambre. Comme ils n’apercevaient que celles qu’ils s’acharnaient à défendre depuis des années, ils n’arrivèrent pas à cerner la raison de ces cris de détresse.

— Pourquoi avez-vous crié comme si vous aviez besoin d’aide alors que vous êtes seulement avec la reine ?

Massalia chercha à lui répondre mais l’arrivée du roi l’en empêcha.

— Que se passe-t-il ici ? demanda-t-il d’une voix aussi noble que celle d’Aria, mais qui demeurait du moins plus sympathique.

Il soupira au moment où il distingua que les deux personnes les plus chères à ses yeux, se lançaient des regards mauvais, prêtes à se battre. Il ne tenta pas de comprendre ce qui se passait. Adrian prit le bras d’Aria qui protesta, et la fit sortir des quartiers royaux de sa fille. Les deux gardes s’inclinèrent lorsque les deux personnages royaux quittèrent la pièce. Ils firent de même en direction de Massalia quand ils partirent à leur tour, afin de retourner à leur poste.

Massalia était submergée d’une émotion qu’elle entreprenait de contrôler depuis que tous les Lidatssois savaient que l’attitude de la reine ne correspondait pas à ce qu’elle montrait… Elle avait honte d’être la fille d’une personne aussi horrible. Parfois, avant de s’endormir, elle essayait d’imaginer sa vie si elle n’avait pas été la fille d’un tel monstre…

Massalia sentit la fatigue monter en elle. Elle s’effondra dans son lit et sombra dans un profond sommeil.

La princesse de Lidatsse se réveilla plusieurs heures plus tard, lorsque le soleil se trouva au-dessus du château, au milieu d’épais nuages gris. Une douce mélodie résonnait dans ses oreilles.

Qui peut bien chanter d’une aussi belle façon ? se demanda Massalia. Cette mélodie possédait quelque chose d’attirant, de non-humain.

Massalia quitta son lit comme si quelqu’un était à ses trousses et courut dans tout le palais en direction de la sortie. Arrivée dans le jardin royal, la princesse de Lidatsse s’arrêta afin de distinguer une personne susceptible de d’accomplir une telle chose. Elle marchait, sans savoir où elle s’acheminait. Elle n’arrivait pas à identifier d’où la douce mélodie arrivait. Cela rendait Massalia déçue.

S’agit-il de mon imagination ? se questionna-t-elle, désespérée.

Elle chemina vers la statue de son père, placée au centre du jardin. Massalia contempla la sculpture du roi Adrian et se demanda ce qu’il ferait à sa place.

Il examinerait chaque recoin, pensa-t-elle. Elle s’exécuta. Massalia examina chaque recoin du paysage. Tout lui sembla normal. Seule la fontaine lui paraissait différente. Elle s’en approcha et remarqua les tons rosés que prenait l’eau.  

Depuis quand l’eau est-elle devenue rose ? s’étonna-t-elle. La princesse s’avança avec des pas quoique hésitants. Elle hésita même à toucher cette eau mais le fit quand même puisque sa curiosité l’emportait. D’un geste gracieux, Massalia effleura l’eau de la fontaine. Elle souhaita de nouveau recommencer mais de singuliers mouvements qui provenaient du fond de la fontaine, la stoppèrent dans son geste. La terre s’ébranla et poussa un grondement massif, tel un volcan. Non, il ne s’agissait pas de la terre, mais de l’eau. Elle tremblait, autant qu’un séisme aurait pu le faire.Deux magnifiques ailes couleurs de feu sortirent de la source. Utilisées avec beaucoup de grâce, autour d’elles, volaient les gouttelettes d’eau rose de la fontaine qui retombaient en une pluie fine.  

Le propriétaire de ces ailes sortit à son tour. Ce splendide animal était un phénix. Son long corps ardent, trempé du bec aux serres le força à s’ébrouer. Peu après, il se posa à quelques pas de la princesse.

— Bonjour Massalia, vous avez donc entendue mon appel ? la questionna-t-il.

Massalia, toujours sous le choc de l’apparition de l’animal mythique, lui répondit maladroitement :

— C’était vous ? Il fallait que je m’y attende. Je n’ai jamais rien entendu d’aussi beau.

Le phénix lui demanda le fait de voir un oiseau tel que lui, l’impressionnait.Les phénix font partie des mythes Lidatssois, lui apprit Massalia.

Bien. Si j’ai cherché à vous faire venir ici, c’est parce que la reine Aria a mis au point un plan pour s’emparer du trône de Lidatsse …

Il ne s’agit pas du premier, le coupa la princesse.

Je suis d’accord avec vous mais celui-là possède de fortes chances de réussite, reprit-il, exaspéré par l’attitude de Massalia.

Et vous croyez que je peux l’en empêcher ? hasarda-t-elle.

— Oui. Je dirais même que vous êtes la seule personne à pouvoir le faire.

  Massalia prit un ton enjoué et le questionna :

— Que dois-je faire ? Tant qu’il ne faut pas y laisser ma vie …

— Si vous croyez que cela va être facile, alors vous vous trompez fortement.

— Dépêchez-vous de me dire ce que je dois faire ! cria-t-elle, de la même manière que le faisait Aria, du moins, avec une petite pointe de peur dans la voix.

— Calmez-vous, princesse, lui répondit-il, de façon sage. Puis, il enchaîna avec la réponse que Massalia attendait. Vous devez vous poignarder …

— Quoi ! Proposez-moi une autre solution, le pria Massalia.

— Je crains de vous décevoir. Il n’y a pas d’autres solutions qui pourrait nuire à l’arrivisme de la reine. Il existe des milliers de moyens qui pourrait faire tomber un roi ou une reine, mais aucun ne peut convenir pour Aria qui saurait les déjouer.

Massalia ne se contenta pas de lui donner une réponse. Elle le fixa dans les yeux jusqu’à ce que, finalement, elle lui avoua qu’elle le ferait. Mais elle ajouta :

— J’agirai comme vous avez souhaité, seulement parce que vous êtes l’un des animaux mythiques qui veillent sur Lidatsse.

Le phénix la remercia d’un signe de tête et lui expliqua son plan :Vous devrez agir dans les quartiers de la reine, de préférable, dans sa chambre. Puisque le roi et la reine ne vivent plus dans les mêmes quartiers depuis des années, personne n’accusera le roi car il ne sera pas suspect. Par contre, vous devrez prendre une arme à Aria, une que le roi lui a offert.

Un couteau qu’elle cache au milieu de ses vêtements ? risqua Massalia.

— Oui. Allez-y maintenant. Aucun garde ne surveille l’entrée de ses quartiers.

Sur ces derniers mots, le phénix replongea dans la fontaine qui reprit sa teinte bleutée habituelle.

Massalia se risqua dans les quartiers royaux de la reine. A cette heure-ci, aucun garde ne surveillait l’entrée de la chambre d’Aria. Le moment était donc bien choisi pour s’y risquer. La princesse de Lidatsse y pénétra le plus discrètement possible. Les quartiers d’Aria avaient bien changé depuis la dernière fois que Massalia y était allée. Elle se surprit même à regretter leur complicité d’autrefois.  

Pourquoi est-elle devenue aussi méchante ? regretta-t-elle.

Autour de Massalia, tout était magnifique. Les murs en or, parsemés de petites pierres précieuses, avaient sans doute été conservées pendant des siècles. Dans cette chambre, se dégageait une odeur de renfermé ce qui devait sans doute en être le seul défaut. Massalia comprenait pourquoi. Les servantes avaient l’obligation de nettoyer toutes les chambres du palais, chaque jour. Mais depuis le changement de caractère d’Aria, il était normal qu’elles aient peur de s’y aventurer et de risquer de s’attirer les foudres de la reine.

Massalia s’avança jusqu’au lit de la reine de Lidatsse et remarqua qu’au-dessus de celui-ci, se trouvait un cadre qui contenait une peinture d’Aria, assise sur le trône d’Adrian. La princesse de Lidatsse ne comprenait pas pourquoi sa mère tenait tant à être sur le trône puisqu’elle régnait déjà en tant que reine. Elle cherchait sûrement à se débarrasser d’elle et d’Adrian afin d’être la seule détentrice du pouvoir.

Massalia s’avança sur la pointe des pieds jusqu’à l’armoire à vêtements. Dans toute la chambre d’Aria, seule cette armoire était correctement gardée par un cadenas. Même un voleur savait que si un objet de valeur se trouvait dans cette pièce, il se situait dans cette armoire. Autrefois, le roi Adrian lui avait appris à ouvrir un cadenas avec un fil de fer.

Heureusement que je me suis attachée les cheveux, aujourd’hui, se réjouit-elle. Elle se détacha les cheveux et se mit à chercher avec son élastique en fer, l’endroit qui déverrouillait le cadenas. Massalia ouvrit sans aucune difficulté ce cadenas de taille moyenne. Doucement, elle posa le cadenas et sa chaîne, sans faire de bruit, au cas où quelqu’un l’entendrait.

Massalia écarta les vêtements et aperçut au fond de l’armoire une petite trappe, où un couteau était posé, derrière. Elle se dépêcha de l’attraper et remit chaque vêtement à sa place pour ne pas éveiller les soupçons. Elle referma le cadenas autour de l’armoire et se remémora l’acte qu’elle devait accomplir. Elle devait le faire, mais penser qu’il fallait mourir restait très dur pour elle. Elle savait que si elle agissait ainsi, elle n’accéderait jamais au trône comme elle en rêvait, mais cela ne lui importait plus, à présent. Sauver le royaume de cette femme cruelle comptait énormément pour elle.

Massalia empoigna le couteau de ses deux mains. Elle mit le bout de la lame sur sa poitrine, à l’endroit où se situait son cœur. Elle tenta à plusieurs reprises de se poignarder, mais Massalia s’en révéla incapable. Plusieurs souvenirs lui revinrent en mémoire. Joyeux, ils avaient tous été passés en compagnie de la reine. Autrefois, Massalia désirait lui ressembler. A cette époque, Aria était douce, souriante et à l’écoute du peuple.

Elle n’aurait jamais dû changer et devenir ce qu’elle est, se lamenta Massalia. Des larmes se mirent à couler sur ses joues. Elle se sentait à présent plus malheureuse que jamais, mais cela se finira bientôt. Dans quelques instants, elle quittera ce monde pour vivre dans l’au-delà …

Son chagrin demeurait insupportable. C’était maintenant ou jamais, il fallait qu’elle se décide. Soit elle se poignardait et sauvait le royaume, soit elle partait pour vivre ailleurs et le roi Adrian se ferait tuer par la reine. Si elle choisissait la seconde option, elle aurait la mort de son père sur la conscience. Elle ne le supporterait jamais. Cette pensée lui redonna du courage. Afin de ne plus hésiter, elle s’enfonça le couteau dans le cœur. La douleur que ressentit Massalia la faisait encore plus souffrir que son chagrin. Inouïe, fulgurante et brusque, voilà ce que représentait sa souffrance. La princesse retira son couteau en se souvenant de ce qu’elle venait d’accomplir. Penser à la paix qui arriverait à Lidatsse, la consola. Elle essuya son couteau sur le lit de la reine, et …

Adrian et Aria se trouvaient depuis quelques instants dans leur salon privé, mais un garde, affolé, arriva et demanda à parler en privé au roi.

— Que se passe-t-il encore ? l’interrogea Adrian, qui ne comprenait pas ce qui pouvait arriver puisque sa femme se trouvait à côté de lui.

— C-c ‘est votre fille, bégaya-t-il.

— Que se passe-t-il ? Ne me dîtes pas qu’elle est encore tombée dans les escaliers …

— Non, c’est pire que cela, lui répondit-il, le corps vacillant. Elle a été poignardée dans les quartiers de la reine avec cet objet.

Adrian reconnut le couteau que lui présentait le garde. Il s’agissait d’une des nombreuses armes qu’il avait offert à la reine, en cas de besoin.

Adrian pleura toutes les larmes de son corps puis se ressaisit. Il ordonna au garde :

— Embarquez la reine !

Un autre garde apparut. Il tenait dans ses bras le corps inanimé de la princesse qu’Adrian attrapa à son tour. Il lui répéta ses ordres. Le soldat accourut et rejoignit l’autre garde. A eux deux ils embarquèrent leur nouvelle prisonnière, la reine Aria.

Adrian se pencha sur sa fille et murmura :

— Je suis vraiment désolé, Massalia. Tu aurais dû devenir reine.

Une larme coula sur sa joue et se déposa à l’endroit où la princesse s’était poignardée.

Quant au phénix, il ne perdait rien de ce qui se passait au château. Il savait à présent que la princesse lui avait obéi et que la reine était à présent emprisonnée. Désormais, il devait rembourser les dettes qu’il avait envers Massalia. Mais le geste de la princesse était-il suffisant pour sauver le royaume de Lidatsse ?

Roman ou lettre ?

 Une page blanche. Je n’étais qu’une page blanche parmi toutes celles d’un simple cahier, sans importance, sans peines. Une feuille parmi toutes celles présentes dans le bureau d’un écrivain qui attendait son heure de gloire.

Tout dans ce quotidien m’allait. J’étais heureuse, je rêvais et beaucoup de soin nous était accordé à moi et mes compagnes de ce cahier. Et même si ma vie ne se résumait qu’à l’attente du jour où il ferait de moi une partie de son roman, rien ni personne ne pouvait s’emparer de ma joie.

Après tout, une romance entre deux mots oubliés de notre société moderne ne pouvait que plaire à quelqu’un comme moi, une feuille de papier. Je ne pouvais qu’espérer accueillir les phrases écrites par cet homme bourru, mais poétique.

Tous les soirs, quand l’écrivain partait et éteignait la lumière de son bureau, je songeais aux mots oubliés de cette histoire. Il y avait entre autres patiente et authenticité, les clefs de ce récit, mais aussi leurs amis, comme lenteur ou raison. Je me demandais aussi quels étaient ceux que nous avions véritablement oubliés, quels étaient ces mots qui n’avaient pas suivi le rythme. Bien sûr, je n’en trouvais aucun.

En tant que partie intégrante du cahier, j’avais accès à toutes les annotations mises sur les pages précédentes. J’adorais ce que je lisais.

 « La patience, vertu dont manque cruellement les Hommes de ce monde défaillant, est assez stricte. Parce que pour elle, il n’y a toujours qu’une chose à faire. Attendre le bon moment, pour enfin se lancer. »

Patiente, le mot caractéristique de mon existence. Le mot qui me permet de résister à la pression de l’ennui. 

« Authenticité ! Viens vers moi, et aide-moi. Fais que dans leur bêtise, les Hommes paraissent moins sots. Fais de leurs paroles pleines de mensonges des paroles empreintes de sagesse. Apprends aux Hommes ce que tu connais le mieux. Apprends-leur l’authenticité. Ouvre-leur la porte de la vérité. »  

 Un autre mot que personne ne comprend vraiment. C’est vrai ! Qui ne fait jamais attention à son image ? Qui vit en ne pensant qu’au présent et à rien d’autre ?

Cette romance, c’était un récit singulier, dont la philosophie était digne d’Aristote, de Platon ou de Kant. Et je ne rêvais que d’une chose, sentir le contact de la plume sur ma peau. Ce qui arriva, bien sûr. Mais… Je n’étais finalement pas prête pour ce jour. Après tout ce temps d’attente, j’allais devenir une page du livre. Et le sens qu’avait ma vie devrait changer. Mais comment ? Je ne pouvais pas savoir.

 Mon écrivain avait la fâcheuse tendance d’écrire une bouteille à la main. Et, bien que je le visse chaque jour, ce depuis des mois, je ne savais rien de lui, de sa vie, de son entourage, de ses autres occupations. Je ne le voyais que lorsqu’il travaillait, donc, qu’il écrivait. Le reste du temps, le bureau demeurait vide. Je n’entendais alors que quelques bruits. Ceux que faisaient des verres brisés, des voix colériques, des pleurs, des fracas… Rien que je ne pouvais comprendre. Je ne pensais pas une seconde que mon héros, un si bel auteur, puisse être un alcoolique détruit, qui ne croyait plus en sa vie, et qui la haïssait même de tout cœur.

Je ne voulais pas y croire. Je ne voulais pas croire que cet homme n’avait rien d’un héros, qu’il ne valait rien.

Mon écrivain fit de moi une lettre. Un triste message d’amour et de passion, de mort et de dépression. Une lettre d’excuse.

Plutôt que de m’inclure dans son roman, il m’arracha de mes amis. Il ôta ma raison de vivre, supprima mes rêves. Et tout cela en moins de deux pauvres petites minutes. 

Quand il m’arracha, une étrange sensation me traversa. Un mélange de douleur et de chatouille. Il m’emmena ensuite hors de son petit bureau, le pas lent, titubant. Ce qui me permit de découvrir le reste de la maison.

Affreuse.

 Le sol était sale, jonché de paquets de chips. Des bouteilles vides s’entassaient dans un coin de la maison et l’écran de la télé ne ressemblait plus à rien.

Il attrapa un stylo sur la table basse, me plaqua violemment contre un pupitre, et écrivit une lettre sur ma peau.

Une lettre qui disait :

« Amélie…

 Salut. J’espère que tu vas bien. Que ta vie est superbe, que tout va bien avec ton nouvel amoureux, et que je ne te manque pas trop. Ce qui ne m’étonnerait pas. 

Pour ma part, ça…ça pourrait aller mieux…

(Je ne sais pas comment donner un effet dramatique à cette lettre, ni comment te donner du suspense, alors pour me faire plaisir, imagine que je soupire.)

(Soupir)

Tu me manques. Vraiment. Je pourrais te dire le contraire, c’est sûr, mais à quoi bon ? A quoi le mensonge sert-il là où je suis rendu ?

Parce que, oui, si tu veux que je te dise, je vais mourir.

Quand ? Je ne sais pas.

Pourquoi ? Je n’ai pas voulu écouter. Il me semble juste que c’est lié à mon alcoolisme ou un truc du genre. Je sais juste que je vais rester chez moi à attendre que les jours passent, et pourrir ici, dans cette ville morbide où pas un seul jeune ne vit (ce que je comprends, vu l’état des lieux)

Et puis, tu sais, ce n’est pas si mal. Je n’ai plus ma place dans ce monde. Je n’ai plus d’argent, plus d’électricité dans quelques jours, sans doute plus beaucoup d’eau. Mes biens disparaissent tous, tous les jours. Je suis endetté jusqu’au cou.

 (Soupir de nouveau)

 Je suis fatigué. Je veux plus me battre. Pardonne-moi, mais je baisse les bras. Je n’ai plus ma chance dans ce monde-là. Mais s’il existe un au-delà, peut-être que les choses seront mieux ? Que j’aurais une raison de continuer mon combat ? Que mon nouveau corps ne me lâchera pas ?

Ah, aussi, j’ai une question à te poser.

Amélie, tu m’aimes toujours ? Je sais que j’ai été une personne horrible, que j’aurais dû t’écouter, abandonner mes rêves stupides… Mais tu comprends que… Comment dire (ou écrire) … Je crois que j’ai écrit trop de dialogues pour mon roman… Je devais vivre ma vie, faire des expériences. Et comme tout le monde, c’est ce que j’ai fait.

Mais je ne peux m’empêcher de te poser la question. M’aimes-tu toujours ?

Aussi, accepterais-tu de me présenter nos enfants, avant que je meure ? D’oublier nos erreurs de jeunes, au moins pour une fois ? De ne pas rendre nos enfants accros aux écrans, de leur donner uniquement des vêtements corrects ?

Voudrais-tu t’occuper de mon livre et lui offrir une seconde vie ? Lui apporter ton point de vue ? Écrire dans ce livre inachevé la plus belle des fins, et raconter avec tes mots le message que je n’ai sus faire passer ? Tu sais, ces messages et ces morales que toi seule est capable d’offrir au monde.

Voudrais-tu rester authentique comme tu l’as toujours été ? 

Et… S’il te plait, essaie de ne pas trop pleurer. Je m’en voudrais. »

Quand je fus envoyée, qu’Amélie me reçut, ma surface fut recouverte de larmes. Son compagnon lui répétait toujours la même chose : « Tout est pour le mieux, c’est toi qui le dis toujours, tout est pour le mieux. Et puis sa mort ne sera pas une grande perte. »

Elle passa ensuite son temps toute seule, à songer au divorce, à ses rêves, à « Ivan ».

Et quand Amélie décida de faire ce que voulait « Ivan », elle quitta son amoureux.

« Tout est pour le mieux, tu as raison. Je ne verrai plus ta sale tête ! »

Elle se rendit donc dans son ancien foyer, où elle découvrit avec une profonde tristesse qu’« Ivan » était mort.

Elle prit soin du livre. Elle le corrigea. Elle créa une œuvre merveilleuse.

Amélie décida d’en faire une œuvre synonyme de paix, de bonheur, de sagesse et de positivité.

Elle réécrivit la lettre comme épilogue.

Elle parla de ses pensées en prologue.

En préface, elle parla d’« Ivan » et de sa vie.

Et enfin, elle publia le livre. Ce livre qui n’aurait jamais été fini sans cela.

« La vie est un jeu, annonça le Présent. Il suffit de tenter le tout pour le tout, sans réfléchir aux conséquences, et tout se passera bien. La vie prend soin de tout le monde. »

« Si la Patiente et l’Authenticité se marient, je n’ose imaginer ce qui arrivera, clama la Mensonge. Les gens prendront leur temps, vivront au jour le jour, et là, plus de manipulation, plus besoin de moi. »

L’histoire que je vous compte aujourd’hui doit vous paraitre inutile, idiote, sans objectifs concrets mis à part rendre triste le lecteur.

Si c’est ce que vous pensez, alors soit. Mais vous êtes loin du compte.

L’histoire que je vous compte aujourd’hui, c’est celle d’un homme qui mourut triste et abandonné, tout cela à cause d’un manque de communications.

Mais surtout, c’est l’histoire d’un homme qui écrivit des choses magnifiques et d’une femme qui compléta ce travail pour offrir de belles pensés à l’Humanité.  

Je suis fière de cet homme, même si, oui, en tant qu’homme, il ne méritait pas ces mots. Mais en tant qu’écrivain, il faisait des choses merveilleuses. Et même si sa vie était triste, elle reste tout de même un grand message d’espoir.

Et vous, chers lecteurs, si vous ne voulez pas que ce travail n’ait pas été vain, rappelez-vous de ceci :

Soyez patient, et vous aurez tout ce qu’il vous faudra. Dites-vous que pour beaucoup, le bonheur est aussi, et surtout, dans l’attente.

 Soyez authentiques et la vie vous remerciera. Soyez authentiques et la recherche du bonheur ne vous concernera plus. Car le bonheur, vous l’aurez déjà.           

Pour ceux qui se posent la question, oui, Amélie aime toujours Ivan. Elle a même répondu à la lettre.

« Ivan,

 Je prie pour que dans ta nouvelle vie, tu vives une vie qui sera cette fois parfaite pour une personne aussi merveilleuse que toi.

 Et… Attends-moi dans l’au-delà. Car quand mon heure sera venue, je compte te retrouver, et faire de toi mon mari. »

 Il n’est plus, et pourtant, c’est ensemble qu’ils ont tissés ce message.

Comme Amélie aime beaucoup le dire : « Tout est pour le mieux »

(Pour preuve, je ne fais pas partie du roman, alors que je ne voulais que ça, que je ne rêvais que de ça, que cette pensée était toute ma vie. Mais comme tout est pour le mieux, j’ai permis à cette si belle histoire de s’achever.)

Rédacteur : Henri-Marc Papavoine, Amopa 49